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Troisième sexe sur Cannes.

Mon refrain.

Même si je suis sorti de la douche pour un nettoyage qui ne sera aucunement perçu de premier abord, je demeure totalement nu. Un maigre bas recouvre mon empreinte naturelle, et devant le miroir à cette étape de ma préparation je me sens incroyablement exposé même s'il n'est ici question que d'une simple transition.

Ceux qui me rappellent chaque matin ma vraie condition, et que j'ai effacés, ont maintenant disparu. Ils sont tous échoués dans la vasque, et je ne les reverrai même pas au lever car ce travail sera finalement assez pointilleux pour près de douze heures. Je peux ainsi dire que le gros de la préparation et le plus déplaisant a disparu. Il est maintenant temps de se consacrer au plus grisant et au plus jouissif de ce que je vais devenir en l'espace d'une demie heure.

Le petit tube doit me permettre d'assurer largement un mois de sorties, et à quelque chose près une saison entière pour peu que je sache me modérer. Son application se fait du bout du doigt par doses variées mais toujours posées. Je commence comme de coutume par le cou, où je dépose l'essentiel de la substance. Cet aspect de mon personnage a besoin de dissimuler mes défauts originels car c'est à cet endroit que déjà l'age se diffuse chez tous, et que plus proprement parlant je pourrais jouer les insatisfaites. Suite à l'amorce de ma poitrine, viennent plus après les joues sur leur large surface, mais plus précisément leur bas qui marque mes origines bien évidemment.

L'étalement se fait par un premier parcours, mais je sais qu'il faudra revenir juste avant de refermer le contenant plus tard. Mon menton est un élément aussi essentiel dans la continuité de mes pommettes. J'y prête un soin particulier tout comme la partie supérieure à ma bouche qui est tout autant voilée. Ces trois intervalles seront sans aucun doute les plus offertes au temps et aussi aux réactions au stress ambiant que mon épiderme fera resurgir. Je dois par consèquent apposer le maquillage en adéquation avec le programme prévu. Même si tout ceci peut paraître une jolie illustration, je sais parfaitement depuis toutes ces années que mon corps subit une résonnance particulière fonction de la tempèrature comme fonction des événements adjacents lors de mes sorties. Tel un centre de gravité changeant avec les talons ou une simple crampe en devenir selon les contraintes de ma gestuelle.

Enfin arrive le moment où je ponctue l'ensemble par le masque de mon front. Tout comme le reste du visage je ne cherche nullement à cacher les rides d'expression, mais c'est bien dans cette marge que le temps s'affirmera. Elles font partie de mon rôle, et même si je m'applique à bien à en réaliser son manteau, je ne le fais nullement dans le but de mentir sur les années. Le geste est rapide et guidé, car à ce stade il est aussi cette étendue qui signifiera mon retour sur les trajectoires précédentes pour un ultime passage.

Puis je sors la brosse à fond de teint. La poudre disposée sur une peau humide permet une meilleure prise sur mon visage. Inutile d'étaler par un épandage massif, puisqu'un seul lissage suffit pour imprimer le ton légèrement opaque qui fixera mon impression. L'épaisseur de la matière permettra quelque peu de durer dans la nuit pour s'en revenir au petit matin tout aussi pimpante. Là aussi je varie la couche en fonction des projets de la soirée. Même si je n'en suis qu'à la moitié du chemin avant d'abandonner mes accessoires, le fouettement du pinceau est le signe de couleurs arrivant sous peu.

Ensuite je dépose sur mes lèvres le gel souvent rouge, mais parfois rose. Depuis longtemps j'ai compris que se limiter à l'intérieur de la bouche pourvoit très certainement à un meilleur dessin. En effet par le jeu des deux organes, le liquide épais prend bien entendu la forme du charme primaire. Les abords se retrouvent ainsi recouverts, et pour un ancrage bien prononcé il est nécessaire de malgré tout crayonner ceux-ci pour une griffe plus percutante. Ce que je ne ferai pas.

Ce même doigt que j'utilisais juste avant et que j'ai pris le temps de laver d'un coup de gant, me sert maintenant à nuancer mes paupières. Je le trempe comme je gratterais sobrement une peinture cendrée logée dans un disque discret. Une conduite identique donc, qui engendre un ton en phase avec mes prochains vêtements. Et à cet instant la manière est bien plus brève attendu que les dimensions en sont toutes aussi réduites. Pareilles aux cils sur lesquels un mascara viendra s'étendre; ces dernières caresses sont aussi le signe d'un premier acte arrivant à son terme. Et le tournant d'un accomplissement proche.

Pour la seule fois, je prends du recul. Car le moment est venu de finir par le paramètre de mon identité. Le facteur qui annonce le caractère final. Un plaisir mesuré mais réel me traverse, et je pose alors sur mon nez ma doctrine. De la même façon que mon uniforme, elle soulignera ma détermination, et mon choix impatient à toujours vouloir me mélanger. L'appartenance à ma communauté, et aussi cette promiscuité avec d'improbables adhérents.

Il n'y a jamais de changement, la chronologie reste la même. Là aussi j'avance et je me réserve le plus appétissant pour ponctuer la scène. L'humeur suppose une culotte ou un string, mais rien d'autre ne viendra couvrir le tout qu'un inévitable collant. Il drape et s'assimile à mes jambes, comme un intrus qui voudrait se conjuguer à moi. Alors, l'invraisemblable se mêle bien vicieusement à ma finesse, pour ne faire bientôt qu'un avec mon lustre. Je suis élevée et si admirative de ce que je peux contempler plus en bas. Comme une narcissique jubilation qui me suivra toute la nuit. Les escarpins sont une récompense qui accroît davantage ma grandeur, ou une plénitude à me penser tellement au dessus du monde.

La poitrine est gonflée de la recette qui a toujours fait leur bonheur. Au point de chaque fois me demander ce qu'elle est exactement. Et dans un soupir poncif et insignifiant, je suggère une réponse bien normande, qui invite tout bonnement à imaginer le mieux pour eux. Toujours est-il, que l'architecture d'ores et déjà présentée dispose de son essence, et que des rudiments viendront envelopper pour une extravagance définitive.

Le haut avec ou sans manches distingue surtout la continuité avec l'habillage des cuisses. Même serré, il sera encore trop ample pour révèler de plus belle ces membres qui font ma signature. Me regarder dans le miroir de la chambre donne naissance à ce désir à partager mon spectacle. Une vision d'une chaleur demandant à se répandre, mais bien plus à se communiquer. A moins que ce soit communier.

Le frottement de la jupe qui monte le long de mon éclat. Genoux joints et fesses rebondies pour être sûre de bien se loger dans la largeur de sa taille. Le plat des mains qui vient taper le tissu afin de vérifier que sa dimension colle à mes formes. Mes deux pouces passent sous la ceinture pour tasser l'extrêmité de mon haut, et ainsi honorer l'étroitesse de ma gamme à s'arrimer en pareilles mesures. Dans un mouvement tant attendu et d'une fierté assumée puis frôlant l'addiction, je percute le bouton avec son moulage. Et par une félicité pleine de sensualité, je saisis la tirette pour la faire circuler avec malice vers sa butée.

Volontairement j'évite mon reflet. Les coulisses sont sur le point de se refermer, mais il manque un raccord qui me donne certificat. Alors que l'accommodement des bijoux est révolu, je tends les mains vers cette chose inerte qui bientôt prendra vie. Car sans elle je serais encore moins une espérance, et sans moi elle serait bien inconsistante. Un fruit égaré. Un moteur sans vie. Ou un sens sans tuteur. Je lui rends grâce à fermer les yeux quand elle se range à ma hauteur. Sa saisie de mon masque élève nos températures, et soudainement elle s'anime. Tout autant que mon costume elle possède mon genre pour me faire formellement basculer dans l'autre peau. Un énième réveil, ou un profond plaisir répétitif, les deux raisons se muent en une culture commune. Et attestent d'une nouvelle alliance qui confinera à l'authenticité.

Je peux alors me dévisager et me juger. Une veste habillée clora le tout. Je n'ai jamais douté d'y parvenir, et rejeter ma mèche au delà de mon cheminement est reconnu comme ma souscription. Ce soir encore mon engagement sera total. Une rapide concertation sur l'évolution de mon maquillage après application, termine l'assemblage et l'assurance d'un envoûtement. Tout est paré pour grandement plaire.

La porte se rabat dans un claquement sec. A nouveau, mon envol fait partie de mes perspectives pour cette surprenante odyssée, car chacune aura toujours la particularité à être inédite. Une aventure moderne. Parce que j'ai créé cette combinaison de toute pièce. Et parce que je retrace anonymement sa quête de mes mots, noyé dans son sillage fascinant. A moins que je sois tout autant qu'elle déguisé pour cet exercice.

La plume vouée à son image. Le témoin de son audace.

Mon refrain.
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